Prolongement de l’appel à communication pour la prochaine journée d’étude de l’AFRHC – CONTINENTAL FILMS

APPEL À COMMUNICATION – JOURNÉE D’ÉTUDES

CONTINENTAL FILMS : NOUVELLES SOURCES, NOUVELLES APPROCHES

Détail d’une lettre de Continental Films à la Préfecture de Police de Paris, 2 juin 1943.

 

L’histoire de Continental Films, société de production française à capitaux allemands, fondée en octobre 1940 par le producteur Alfred Greven afin de contribuer à assurer la mainmise des autorités nazies sur l’industrie cinématographique française, connaît un indéniable regain d’intérêt depuis quelques mois. La Continental Films, qui avait surtout suscité jusqu’ici des discours d’ordre mythologique (pour la plupart nés à la Libération), a fait en effet l’objet de nouvelles recherches : deux ouvrages entièrement dédiés, de Jean-Louis Ivani (Continental Films : l’incroyable Hollywood nazie, Lemieux, 2017) et Christine Leteux (Continental Films : cinéma français sous contrôle allemand, La Tour Verte, 2017), un dossier de la revue

Positif (n° 682, décembre 2017), ainsi qu’un film documentaire destiné à la télévision, Le Mystère Greven (Claudia Collao, 2017) ; ces événements occasionnant à leur tour moult commentaires. À cela s’ajoutent divers événements non centrés sur la Continental Films mais abordant d’une manière ou d’une autre son activité, comme l’exposition consacrée à Henri-Georges Clouzot par la Cinémathèque française (novembre 2017-juillet 2018), qui s’est accompagnée de conférences et d’un catalogue dirigé par Noël

Herpe, Le Mystère Clouzot (Lienart/Cinémathèque française, 2017). Ce regain d’intérêt concerne aussi l’Allemagne, puisqu’une vingtaine de longs métrages produits par la firme a été programmée par le Deutsches Historisches Museum de Berlin dans le cadre d’une rétrospective inédite (“Filme für das besetzte Frankreich – Alfred Greven und die Continental”, mai-juin 2017), programmation accompagnée de la parution d’un catalogue (compilant des textes déjà parus) dirigé par Ralph Eue : Schillernd grau. Continental : Eine deutsche Filmproduktion im besetzten Frankreich (1941-1944) (Synema, 2017).

Si la plupart des nouveaux travaux consacrés à l’activité de la firme se sont appuyés sur des sources déjà connues et de seconde main (Mémoires et entretiens), l’ouvrage de Christine Leteux se distingue par le recours à des sources premières jusqu’ici peu utilisées, en particulier les mémoires de défense et les procès-verbaux des commissions d’épuration. Toutefois, dans tous ces travaux, d’une manière ou d’une autre, le témoignage des individus, qu’il ait été formulé dès la Libération ou des années après la fin de l’Occupation, est toujours privilégié par rapport à d’autres sources. Or si ce type de sources permet l’émergence de quelques faits peu connus et de discours jusqu’ici peu entendus, il nécessite sans aucun doute, du fait de leur partialité politique, d’être envisagé à l’aune d’autres documents et il empêche par ailleurs de penser l’activité de Continental Films de manière globale, en dehors du cas de tel ou tel acteur, et de facto de comprendre avec précision son fonctionnement, son organisation, ses ambitions, ce qui reste aujourd’hui assez méconnu.

Afin de tenter d’affronter ces problèmes historiographiques, cette journée d’étude ambitionne de compléter ces travaux en inventant d’autres sources, conservées dans des fonds en quelque sorte inattendus pour ce sujet, comme a pu le faire Christine Leteux avec les archives des Renseignements généraux conservés aux Archives nationales. Cette journée souhaiterait également croiser ces sources nouvelles avec d’autres, publiées à l’époque, certes plus connues mais n’ayant jamais fait l’objet d’un dépouillement systématique – lequel est aujourd’hui facilité par la numérisation de certains titres importants : presse spécialisée (Le Film) ou non (Comoedia), en zone occupée et en zone libre (les publications spécialisées de la zone libre étaient sans doute moins contraintes, en particulier dans leur appréciation de la Continental, que celles publiées à Paris : voir par exemple La Revue de l’écran à Marseille et Filmagazine à Lyon, etc.). Sans parler de possibles archives allemandes.

Partant de ces sources, il s’agirait d’envisager l’activité de Continental Films de manière plus générale, en délaissant l’anecdote et les expériences individuelles particulières, pour étudier prioritairement :  – les rapports entre les stratégies de la société et la politique économique, idéologique et culturelle des Nazis en Allemagne et dans les territoires occupés, ainsi que ses relations avec les autorités françaises.

  • l’organisation sociale et économique de la société, sa place dans le trust fondé par les Nazis en France, son fonctionnement et ses pratiques de production. Ces questions, qui engagent des sources témoignant des aspects sociaux, économiques et techniques propres à la société, seront aussi évaluées à l’aune des films qu’elle produit.
  • les films (courts et longs métrages), en interrogeant particulièrement les représentations politiques, idéologiques, culturelles qu’ils mettent en forme, afin de revenir notamment sur la lecture dominante d’une production idéologiquement indépendante de son contexte politique.
  • la diffusion (distribution, programmation, exploitation) des films en France (en tenant compte du fait que la Continental produit des courts métrages susceptibles de constituer des premières parties de programme) et à l’étranger (alors qu’on s’est jusqu’ici focalisé sur l’Allemagne), ainsi que les stratégies de promotion des films par la Continental : publicités, voyages, affiches, premières, produits dérivés (notamment l’édition discographique), etc.
  • la réception des films, mais aussi de la société en elle-même, en se demandant par exemple ce qu’il en est, dans les discours, des liens avec l’occupant (discutés ou occultés ?), et en distinguant les lieux de circulation : en zone libre et en zone occupée, à l’étranger.
  • enfin, le sort de la société et de ses films à la Libération, en interrogeant : la prolongation de l’exploitation commerciale de ses films en France et à l’étranger (voir à ce sujet les travaux en cours d’Éric Le Roy sur le catalogue de Continental Films) ; le statut de la société au sein des discussions autour de la liquidation et de la nationalisation des biens ennemis ; la perception après-guerre de la société et de ses films, dans le contexte de l’épuration. On pourra s’attacher notamment à l’ampleur et à la diversité (souvent minorée) des discours et des polémiques autour du Corbeau (Henri-Georges Clouzot, 1943).

Les propositions de 2 500 signes maximum, accompagnées d’une brève bio-bibliographie, doivent être envoyées à afrhc@contact.fr avant le 2 mars 2019. Réponse aux propositions courant avril pour une journée d’études organisée à l’INHA (salle Vasari) le 12 septembre 2019.

Comité scientifique : 

Laurent Le Forestier (Université de Lausanne), Guillaume Vernet (Paris 1, HiCSA).

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